Slow fleuriste

Par amour, la fleuriste Emily Avenson a quitté sa Californie natale pour s’installer en plein cœur de la campagne liégeoise. Elle vit aujourd’hui à Charneux dans une ferme bordée de champs où s’exprime sa passion pour les fleurs. Celles qui composent ses bouquets, aussi sauvages que poétiques, sont cultivées avec patience par cette Américaine férue de nature. 

A quand remonte votre passion pour les fleurs ? 

« Pour être honnête, je l’ignore. Je sais juste que j’ai toujours aimé observer les dégradés de couleurs, quels qu’ils soient. Comme ces parfaites rangées de vernis à ongles de toutes les teintes que l’on peut voir dans les parfumeries. Je n’ai donc jamais baigné dans l’univers des fleurs durant mon enfance mais j’ai en revanche toujours été entourée par la nature sauvage lorsque je vivais en Californie du Nord. Petite, ma mère aimait aussi me parler des multiples variétés de fleurs qui poussaient dans notre jardin. » 

A quel moment avez-vous eu envie de devenir fleuriste ? 

« Lorsque je suis arrivée en Belgique, j’ai dû repartir de zéro. Me recréer une nouvelle vie dans un pays étranger. A l’époque, je n’avais pas encore d’enfant et pour occuper mes journées en attendant de trouver un emploi, je me suis mise à jardiner, à créer un potager et à faire pousser des fleurs. Avec celles-ci, je composais de petits bouquets dont je décorais la maison. Je les prenais aussi en photos et les postais sur mon blog et les réseaux sociaux. Cela me permettait de réunir mes trois passions : les fleurs bien sûr mais aussi l’écriture et la photographie. C’est de cette façon que j’ai été approchée par des wedding planners pour gérer la décoration florale de mariages. Je me suis prise au jeu et mon activité n’a cessé de grandir depuis. Je fleuris donc des mariages, je crée des bouquets pour des particuliers ou des arrangements floraux pour des événements. Depuis l’an dernier, j’organise aussi des workshops thématiques de manière ponctuelle. »

Ce métier, vous l’avez appris en autodidacte ? 

« Oui, à coups d’essais et d’erreurs, en pratiquant encore et encore. Lorsque les premières fleurs se sont mises à pousser dans le jardin, j’ai cherché sur internet des fleuristes inspirants et j’ai minutieusement étudié leur façon de procéder. Cela m’a permis d’orienter mon travail dans une direction précise et de trouver mon propre style. »

Cultiver vos fleurs semble vous être essentiel dans la pratique de votre métier ? 

« Absolument. C’est arrivé un peu par hasard mais c’est devenu très important pour moi. Cultiver mes propres fleurs, les observer grandir et me dire que j’ai joué un rôle prépondérant dans ce processus me fascine. Même si je suis tributaire des conditions climatiques et que cela représente un véritable défi au quotidien. Mais cette connexion avec la nature me nourrit. C’est très gratifiant de pouvoir composer des bouquets avec des fleurs que l’on a vu naître. Le jardin accueille des dahlias, des roses, des pivoines, des cosmos, des anémones, des renoncules, des hortensias, des clématites et bien d’autres variétés. J’ai même réussi à faire pousser des pavots californiens dont j’ai ramené quelques graines du jardin de mes parents. Je veille à ce que mon jardin soit le plus naturel et spontané possible. Les pesticides y sont bannis. J’enlève les insectes indésirables à la main. J’use aussi des principes de la permaculture en plantant par exemple des capucines sous les roses car celles-ci attirent les pucerons. »

Comment définiriez-vous le style de vos créations? 

« Je pense qu’il est à la fois sauvage, romantique et champêtre tout en étant très actuel. J’essaie de créer des compositions dont les teintes neutres et les irrégularités sont au plus près de la nature. J’aime incorporer des baies, des herbes peu conventionnelles et des feuillages sauvages que je dispose entre les fleurs fraîches. La nature m’inspire donc beaucoup au même titre que les peintres flamands de l’âge d’or. On me dit d’ailleurs souvent que mes compositions ressemblent à des peintures et possèdent un côté nostalgique. »

Comment réalisez-vous vos compositions florales ? 

« Je me laisse porter par ma créativité du moment mais j’essaie toujours d’avoir un élément qui capte le regard, que ce soit au niveau de sa texture ou de sa couleur. Je débute généralement une composition ou un bouquet avec une fleur de grande taille ou une branche et je construis le reste autour de cet élément. J’aime aussi que les fleurs se « regardent » en quelque sorte. Pour nouer mes bouquets, j’utilise des rubans de soie que je teins moi-même à la main à l’aide de matières premières organiques telles que des peaux d’oignons, des cosses de noix, des pelures de grenade, des haricots noirs, du café, du thé… »

Vous vivez en Belgique depuis plus de dix ans maintenant… Qu’est-ce qui vous séduit ici ? 

« J’aime beaucoup le mode de vie, tellement plus lent et apaisant que celui des Etats-Unis. Je raffole aussi de la cuisine et je suis prête à beaucoup pour déguster un croissant ! La situation géographique de la Belgique est idéale, rendant une multitude de pays accessibles en quelques heures seulement. J’apprécie aussi beaucoup la nature luxuriante de la région dans laquelle je vis. »

Quel rêve aimeriez-vous encore réaliser ? 

« Créer un livre qui réunit une collection d’images de compositions florales accompagnées de jolis poèmes est une idée qui me titille. Mon emploi du temps actuel ne me permet pas de me pencher sur ce projet mais peut-être aurai-je un jour la chance de le concrétiser… »

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