Pliages graphiques

Elle découpe, plie, colle et assemble. Des doigts de Margaux Baert naît une multitude d’œuvres en papier. Fantaisistes ou réalistes mais toujours délicates et poétiques. Rencontre avec cette artiste, Namuroise d’origine et Bruxelloise d’adoption, pour qui le papier n’a plus vraiment de secret.

 

Quand avez-vous commencé à vous intéresser au papier et à ses multiples possibilités ?

« Le travail du papier en tant que tel est arrivé tardivement, durant mes études artistiques. Mais j’ai toujours aimé dessiner et j’ai débuté des cours très tôt, en explorant différentes techniques allant du dessin à l’aquarelle. Pour un projet scolaire, je me suis mise à découper des plumes en papier. D’abord une, puis dix, puis cent. Je les ai ensuite assemblées pour créer un masque. C’est venu assez naturellement, j’ai suivi mon instinct et ne me suis plus arrêtée. Par la suite, j’ai confectionné des oiseaux et des petites pièces d’ombres chinoises. J’ai beaucoup travaillé le blanc dans un premier temps, les couleurs sont arrivées plus tard. »

Parlez-nous de votre parcours…

« J’ai débuté La Cambre en 2009, dans la section Gravure et Images imprimées. L’année suivante, j’ai rejoint l’atelier de Communication Graphique et Visuelle. Après l’obtention de mon diplôme, j’ai travaillé comme directrice artistique dans une agence de presse et, parallèlement, en tant que graphiste freelance pour des clients issus du milieu du design de mobilier. C’est à ce moment-là que je me suis mise à développer mes premières créations en papier. J’ai collaboré avec le Studio Marianne Guély à Paris, spécialisé dans le travail du papier, avant de lancer officiellement mon propre atelier dans le courant de l’année 2020. »

 Pourquoi avoir fait le choix de ce matériau ?

« Lorsque j’ai commencé à travailler le papier, j’ai eu la sensation de découvrir un tout nouveau médium, jamais exploré auparavant. Le passage du dessin sur papier à un volume donnait une nouvelle dimension à ma pratique artistique et les possibilités m’ont semblées infinies. L’envie de créer a toujours été présente chez moi - et mes parents m’ont encouragé à suivre cette voie - mais je me suis beaucoup questionnée sur la direction et le médium qui me permettrait de m’exprimer pleinement. Avec le papier, j’ai le sentiment de donner un sens à mes créations et d’avoir davantage confiance en mes choix artistiques. C’est une forme d’expression extraordinaire car c’est aussi une expérience visuelle et tactile différente du dessin, très proche de la sculpture. Sentir la texture du papier, lui donner forme, le plier ou le rouler, c’est presque une forme de méditation. Réaliser ces pièces me donne aussi l’impression de créer un monde flamboyant, une sorte de cabinet de curiosités. Elles me transportent et j’aime penser qu’elles ont le même effet sur ceux qui les découvrent. Chaque réalisation nécessite de nombreuses heures de travail. J’y mets toute mon énergie et ma concentration, c’est parfois difficile de m’arrêter. Mais le résultat en vaut toujours la peine. »

Quels types de pièces produisez-vous ?

« Mes réalisations sont très diverses selon les commandes ou mes envies du moment. Cette variété de thèmes est enrichissante et formatrice. Cela me permet de découvrir de nouvelles manières de travailler qui vont servir la demande de mon commanditaire. Je réalise beaucoup d’oiseaux, de végétaux, d’insectes. Mais pas seulement. Lors d’un projet pour la marque de vêtements Uniqlo, j’ai créé des formes géométriques très colorées. Pour une vitrine de la STIB - Société de transports bruxellois -, j’ai également conçu des façades de maisons, un tram et une montgolfière. Je travaille donc avec des marques, des boutiques et des agences de publicité mais aussi avec des particuliers qui souhaitent acquérir une œuvre en papier. Dans mon atelier, je propose également des cours de dessins pour adultes et enfants. »

Une certaine dextérité est nécessaire pour exercer ce métier. Quelles sont les autres qualités essentielles ?  

« Je pense qu’avoir une bonne notion des proportions, des couleurs et des volumes est également important. Il est indispensable de pouvoir gérer une composition et réaliser une forme juste, que ce soit pour une pièce géométrique ou organique. Dans cette optique-là, je sens que ma formation de graphiste me sert énormément. Il faut aussi pouvoir faire preuve de minutie, de patience, de curiosité et d’un certain sens de l’observation. Lors d’une commande, il est important de se plonger dans l’univers du commanditaire, de s’imprégner de son ADN et d’y puiser son inspiration car on met notre savoir-faire à son entière disposition. »

 Parlez-nous du processus de création…

« Lorsque je crée un oiseau par exemple, je regarde en premier lieu beaucoup d’images. Je passe un temps fou à observer, analyser. Son anatomie, les détails de ses plumes, la façon dont il se déplace. Si je peux l’étudier en vrai, c’est encore mieux ! Ensuite, je réalise des croquis pour bien saisir les proportions, le mouvement des ailes. Puis, je sélectionne les papiers que je compte utiliser, je vois comment les couleurs réagissent à la lumière. Vient par après le choix d’une position définitive pour l’oiseau et, sur base de cette décision, je réalise une structure. Je découpe les plumes, à la main ou à l’aide d’une machine de découpe à lame, puis je les colle une à une sur la structure. Créer un oiseau ou un animal peut nécessiter entre une à trois semaines de travail. Il m’arrive de faire appel à d’autres artisans talentueux pour m’aider à la réalisation de projets de grande envergure. »

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